Voilà ce qui arrive quand on est un brin désoeuvré. Un dimanche après-midi je décide avec un week-end avec ma compagne, mes enfants et des amis de m'offrir une petite heure de désoeuvrement. Je me rends à ma librairie préférée où n'officie plus ma libraire préférée mais soit.

Ayant (chose rare) oublié de me munir d'un livre je décide de m'en acheter un. Quelque chose de facile à lire cependant, sans pour autant sombrer dans du Marc Levy. Je décide donc d'aller fouiner dans le rayon des biographies. Et je tombe sur une biographie d'Einstein d'un certain Laurent Seksik,  dans la collection Folio biographies.

D'emblée je suis un peu géné par le style un peu pompeux et l'identification trop forte à Einstein. J'ai toujours été inconfortable lorsque des gens mettent les pensées intimes des personnes devant leur actes.

Celà dit, je suis malgré tout content de lire, j'apprends certaines choses inconnues sur la vie d'Einstein, sa jeunesse, son parcours atypique avant la consération. Comme je suis convaincu qu'il est impossible de dissocier l'oeuvre d'un personnage de sa pensée, j'étais curieux en fait de voir comment la vie d'un physicien de génie pouvait déterminer ses futures découvertes. Pour être honnête je tenais pour plus grand génie, Richard P. Feynman et avec ce livre j'ai pu entrevoir que finalement c'était effectivement un génie du fait de son parcours atypique, hors de l'Université. Mais à vrai dire je pense que n'importe quelle biographie m'aurait éclairé.

Par contre j'ai commencé à avoir des doutes sur le sérieux de la biographie lorsque l'auteur aborde le début de sa carrière scientifique. On sent clairement que ce n'est pas son terrain de prédilection. Tout dabord il se focalise sur la soit-disante obsession d'Einstein à déboulonner la physique Newtonnienne. Mise à part la gravitation, la physique d'alors n'avait plus grand chose de Newtonien. On était convaincu de la nature ondulatoire de la lumière. L'atomisme n'a pas le vent en poupe. Les équations de Maxwell triomphent. Par exemple lorsqu'il dit page 72, que les lois de la gravitation de Newton embrassent toutes les disciplines physiques, de la mécanique classique à l'optique ou page 73 La physique de Newton forme un tout qui constitue la base de des connaissances humaines sur le monde, je ne peux que le conseiller vivement d'ouvrir un cours de premier cycle universitaire. De plus il semble qu'il confonde l'éther luminifère avec l'éther par lequel la gravitation devrait opérer. L'éther dont se débarassera Einstein est celui nécessaire comme milieu à la propagation des ondes électro-magnétiques, celui de l'ébauche de la théorie de la relativité faite par Poincaré quelques années plus tôt.
À la page 74 lorsqu'il cite les expériences de Hertz, elles sont en contradiction avec la physique de Newton puisqu'elles ont consacré les équations de Maxwell confirmant la nature ondulatoire et non corpusculaire de la lumière.

Une des révolution d'Einstein dans son article concernant l'effet photo-électrique consiste à réintroduire la nature corpusculaire de la lumière, justement comme Newton ! En un sens dans l'article Sur un point de vue heuristique concernant la production et la transformation de la lumière La différence c'est que l'énergie de ces grains de lumière ne peut adopter que des valeurs précises inspirées justement des travaux de Planck. Et contrairement à ce que prétend notre piètre biographe, c'est justement heuristique, il ne démontre pas une théorie, mais cherche à expliquer un phénomène, le reliant à l'explication du corps noir donnée par Max Planck cinq ans plus tôt.

Autre erreur celle de considérer que Planck propose une nouvelle théorie de la lumière. Planck ne fait aucune hypothèse sur la nature même de la lumière, mais sur les échanges entre lumière et matière. Le désir de Planck était surtout d'arriver à expliquer une des rares expériences de physique qui ne cadrait pas avec la théorie admise.

Page 79 Pour en revenir à l'article fondateur de la relativité restreinte, l'auteur se fourvoie aussi sur la notion de relativité. Parler de la relativité resteinte sans parler de la relativité galliléenne est une énorme erreur. La relativité existe bien, c'est le concept de simultanéité qui ne peut ne pas exister puisque la vitesse de la lumière y est relative. Un des postulats d'Einstein est que la vitesse de la luière est constante quelque soit, la référentiel ou l'on se trouve. De là découle l'ensemble des lois.

Page 82, JAMAIS la relativité n'a autorisé de voyager dans le temps.C'est un non-sens complet.

J'en étais là de mes pérégrinations, m'énervant de plus en plus, mais espérant qu'une fois que j'aurais passé les parties scientifiques, la partie biographique alait reprendre le dessus. Je me suis malgré tout mis à chercher des critiques, que je supposais nombreuses tellement le nombre d'énormité est important. Et curieusement j'ai appris qu'en plus d'être incompétent en physique, l'auteur l'est tout autant en géographie et en histoire. Et ceci grâce à  Giangi Régnier qui a fait une critique remarquable du livre.

Si je vous conseille de lire cette critique, car les autres erreurs sont finalement plus énormes que les miennes, si vous ne le faites pas ne commencez surtout pas à lire cette biographie. Vous en apprendrez plus en lisant simplement l'article de wikipedia qui lui est consacré. Je remercie d'ailleurs Giangi Régnier car sa critique m'a convaincu définitivement que je ne perdrais pas une minute de plus à lire ce machin, puisque je ne trouve pas d'autres mots.
Il m'arrive très rarement de ne pas terminer un livre, mais je vais faire une exception. Ce qui ne m'était même pas arrivé avec Marc Lévy.